Lorsque nous allumons les lumières ou la télévision, nous ne nous inquiétons pas de la façon dont l'électricité nécessaire est produite. Elle l'est, c'est tout. D'une manière ou d'une autre, dans quelque obscure centrale, la production correspond à la demande. Quand tout le monde utilise l'électricité en même temps, il y a un pic de consommation, ce qui déclenche un pic de production. Cette production de pointe, plutôt que la production moyenne, est ce qui détermine le nombre des centrales et la taille du réseau. Et toutes les sources d'électricité ne sont pas égales à cet égard :
Avec cette troisième catégorie, on peut se demander : la production est-elle complètement aléatoire ou bien y a-t-il une corrélation entre la météo (et donc la production) et la consommation d'électricité ? Dans le cas de l'énergie solaire le lien est clair : la production est plus élevée en été et pendant la journée, avec peu de production en hiver et aucune la nuit. Dans certains pays, c'est une bonne chose : les pics de consommation électrique sont dus à la climatisation, et se produisent donc en été. Et plus il y a de soleil et plus il fait chaud en été, plus élevé est la consommation ... et la production photovoltaïque. Dans les pays ensoleillés et chauds, les panneaux solaires produisent donc (automatiquement) d'autant plus d'électricité que les besoins sont élevés. Ils sont donc adaptés en Europe du Sud et en Afrique du Nord, dans la moitié sud des États-Unis, etc.
En Allemagne, en Grande-Bretagne et en particulier la France, en revanche, les pics de consommation se produisent en hiver et la consommation estivale est plus faible. La production photovoltaïque est donc complètement à l'envers : d'autant plus haute que la consommation est basse. Les panneaux solaires contribuent principalement à la surproduction estivale. Même si les prix négatifs de l'électricité en été sont quelque peu trompeurs, c'est un fait qu'en Europe l'électricité a beaucoup plus de valeur en hiver qu'en été. (Le vent en revanche souffle plus fort en hiver.)
Cela ne signifie pas que la plupart des pays européens ne peuvent avoir d'électricité d'origine solaire du tout. Par exemple, les grandes installations solaires projetées au Maghreb pour exporter de l'électricité vers l'Europe n'auraient pas le même défaut, étant donné que leur production hivernale serait importante et la corrélation négative entre production et valeur serait plus faible.
Afin de comparer les différents types de production d'électricité (charbon, gaz, nucléaire, éolienne, solaire, etc.) on regarde la production d'une centrale électrique et le coût de la construction et de l'utilisation : le ratio donne le coût par kilowatt heure (kWh). Mais cela suppose implicitement que toute l'électricité a la même valeur, qu'un kWh produit en hiver vaut autant qu'un kWh produit en été.
La corrélation négative entre la production solaire et la consommation d'énergie en Europe (c'est-à-dire que l'un est élevé lorsque l'autre est faible) signifie que les panneaux solaires produisent beaucoup d'électricité en été quand utilité et prix sont bas, et peu en hiver quand elle aurait de l'utilité et de la valeur. Par conséquent, le coût réel de l'énergie solaire est sous-estimé. (Il serait surestimé dans les pays climatisés, où la corrélation est positive.)
Imaginons un pays extrême avec deux saisons marquées : un été très ensoleillé suivi d'un hiver très sombre et froid, sans rien entre les deux. La moitié de l'année, la production solaire serait phénoménale et la consommation dérisoire, et l'autre moitié de l'année, il n'y aurait pas de production photovoltaïque mais une consommation massive. Quelle serait la valeur de la production solaire ? Exactement zéro : les panneaux solaires ne produiraient de l'électricité que quand elle est sans valeur et n'en produirait pas quand elle a beaucoup de valeur. Pourtant, le ratio du coût total sur l'énergie totale produite donnerait un prix apparemment attractif. (Les pays réels présenteront bien sûr une différence plus petite, mais il est clair qu'un tel calcul est très trompeur.)
Pour prétendre que l'électricité photovoltaïque est ou sera bientôt compétitive (sans subventions) il faut commettre une telle erreur de calcul. Payer les producteurs photovoltaïques le même prix pour leur production d'été que ce que d'autres sont payés en hiver (ou faire une telle hypothèse dans les calculs) est en soi une subvention, car ça paie l'électricité photovoltaïque plus que ce qu'elle ne vaut.