Vous vous plaignez que le livret A ne rapporte rien (son taux est passé à 0,75 % par an en août 2015) et que les taux de l'assurance-vie en euros baissent depuis trente ans. Votre banquier vous propose donc de « dynamiser » votre épargne. Qu'est-ce que ça veut dire ? Et est-ce une bonne idée ?
Pour faire simple les réponses sont : pas grand-chose, et pas vraiment. « Dynamiser » vos placements c'est essayer de gagner un peu plus, en incluant sans doute quelques actions. D'une part « dynamique » est un terme marketing flou qui ne signifie rien d'un point de vue financier et qui en plus est utilisé dans différents sens selon le contexte (par exemple par opposition à « équilibré » ou « prudent »), bonjour la précision. D'autre part, il est connoté purement positivement (qui est contre le dynamisme ?) alors qu'il y a aussi des inconvénients en termes de volatilité et de risques de perte en capital.
Un problème à la fois plus subtil et plus grave est que « dynamiser » vos placements n'est pas une bonne idée. Ou du moins, ça n'est pas la bonne façon d'aborder la question. Il vaut mieux vous demander quels sont vos objectifs, de combien de temps vous disposer, etc. Il ne s'agit pas là d'ajouter au petit bonheur la chance un chouia de poudre de perlimpinpin à un livret d'épargne ou à une assurance-vie en euros sans savoir où vous allez, et d'appeler ça « dynamiser ». Il s'agit d'établir un plan adapté à votre situation, à vos besoins et à vos objectifs, et non de rafistoler à la va-comme-je-te-pousse vos placements actuels.
« Dynamiser » c'est remplacer vos vieilles charentaises par une paire neuve pour courir un marathon, plutôt que d'acheter des chaussures de sport. Bonne chance pour gagner avec ça.
Mettons que vous ayez vingt ans devant vous et une assez bonne tolérance au risque. Le placement adapté sera du genre ⅔ actions et ⅓ obligations. Sur cet horizon de vingt ans, les gains de pouvoir d'achat avec une telle stratégie de placement seront quelque chose comme trois ou quatre fois plus élevés qu'avec un placement « dynamisé ».
Cette stratégie sera sans doute complètement différente de votre épargne actuelle (livrets et assurance-vie en euros sans doute), ce qui signifie un changement radical (et nécessaire). C'est certes moins facile que de « dynamiser », mais c'est surtout beaucoup plus efficace. Il faut d'abord changer de point de vue et d'état d'esprit — essayer de gagner de l'argent au lieu d'essayer de ne pas en perdre. Ça n'a l'air de rien, mais c'est crucial.
Il faut aussi s'habituer à la volatilité et aux chutes de cours. C'est sans doute l'aspect le plus difficile pour ceux qui n'ont jamais connu que les livrets d'épargne et les assurances-vie en euros. Le douloureux revers de la médaille de la perspective de gains nettement supérieurs est que vous pouvez temporairement avoir moins que votre capital de départ (même si sur vingt ans les risques de perdre en pouvoir d'achat sont moindres qu'avec un placement « dynamisé »). En pratique, la mise en place peut être étalée sur plusieurs mois pour vous donner le temps de vous habituer petit à petit. Peut-être que vous déciderez que votre portefeuille aux ⅔ en actions n'aura initialement que 10 % d'actions, puis 20 %, etc. (Au début, votre placement aura peut-être l'air d'avoir été « dynamisé », mais ça n'aura rien à voir : il s'agira de la première étape d'un long voyage.)
août 2015